Bien-être

J’ai choisi l’amour (par Alexandre Champagne)

Malgré le fait que le titre de mon texte serait merveilleux pour un roman de Danielle Steel, ce n’est pas pour ça que je l’ai choisi. Il s’agit en fait de l’élément déclencheur d’une histoire pas encore terminée, où je commence à me sauver la vie.

Il était une fois… (J’ouvre un grand livre et je souffle la poussière sur la couverture qui s’envole dans les airs et ondule, pour se transformer en l’histoire que je vais vous raconter. C’est accompagné d’un bruit genre « woudlouwoudlou ».)

O.K. Go!

De l’âge où j’ai commencé à boire et à faire la fête (21 ans), jusqu’au moment où j’ai décidé de vivre dans la réalité et de m’y adresser pour vrai (27 ans), je me torchais la face aux trois jours et je multipliais les aventures avec les filles. J’avais besoin d’amour, d’attention et surtout qu’on me rappelle souvent que je valais quelque chose. Je n’en étais pas capable seul. Honnêtement, personne ne m’avait montré comment.

Je validais ma réussite sociale et personnelle à grands coups de publications sur Facebook, de conquêtes additionnées, de shooters de Jack et de rires de gens que je ne connaissais pas et que je voulais convaincre de mon bonheur, à défaut de ne pas vraiment l’avoir trouvé.

Ce sont ces choses qui m’ont rendu « populaire » et qui m’apportaient le succès, les trophées et les filles. J’avais confiance en ces trucs comme on a confiance en un remède miracle, qu’on trouve dans un forum de Doctissimo.

Mais au fil du temps, ce remède était devenu moins efficace. Je passais des soirées entières à faire de l’anxiété, à rester figé dans mon divan, à penser que j’allais mourir subitement (littéralement), que rien n’allait fonctionner pour moi. Quand ce n’était pas ça, je passais des journées complètes à jouer à des jeux vidéo en me commandant de la bouffe de resto pour ne pas avoir à quitter mon écran.

Résultat : j’avais pris 50 livres en deux ans, j’étais triste, célibataire, pas très riche et je n’avais rien d’autre devant moi qu’un succès web (Contrat d’gars) qui n’avait pas fini comme je l’avais espéré. Mais au moins, tout le monde pensait que j’allais bien, seule récompense que mon grand jeu d’acteur m’avait rapportée.

Je me suis donc pris en main et je suis allé rencontrer une psychologue. À mon premier rendez-vous, je pense que j’ai parlé pendant 75 minutes sans arrêt. Je ne me souviens pas avoir respiré. J’irais même jusqu’à dire qu’après 30 minutes, j’étais cliniquement mort, mais que ce sont les nerfs qui m’ont aidé à poursuivre. Merci, les nerfs.

Après quelques rencontres, je ne voyais pas de changement. Je constatais seulement que j’avais vraiment beaucoup de souffle pour parler sans respirer et que ça, c’était seulement utile pour le métier de plongeur.

Je ne voulais pas devenir plongeur, même si je suis une personne qui apprécie les fonds marins.

Ensuite, j’ai rencontré un psychanalyste. J’aimais l’approche. On parlait de mes rêves, de mon enfance, de la relation amoureuse dans laquelle j’étais. On parlait de mes phobies, de mes angoisses. Il avait un accent français et beaucoup d’expérience; ça m’impressionnait. J’ai fini par arrêter mes rencontres parce que je me sentais mieux. Je n’aurais pas dû, le cirque avait recommencé.

Alcool, jeux vidéo, filles, manque d’attention, angoisse, anxiété.

Puis, un jour, par un heureux hasard, une fille est entrée dans ma vie. Marilou. Elle a été assez habile pour me convaincre que l’amour, ça change tout.

Mais pas le genre d’amour qu’on éprouve pour sa copine, non. L’amour qu’on éprouve pour soi. Parce que je pense que la pire façon de se sentir aimé et important, c’est de le faire à travers les autres. Se lancer dans une relation en espérant que l’autre nous apporte tout ce dont on a besoin, c’est illusoire. En d’autres termes, personne n’est assez sexy pour vous faire oublier votre mal de vivre à tout jamais.

La raison pour laquelle j’avais envie de m’ouvrir sur le sujet est bien simple. Avec du recul, du travail, en toute humilité et sans penser que je peux changer le monde, j’aimerais m’adresser à tous ceux qui se sont reconnus dans l’un ou l’autre des symptômes que j’ai décrits et réussir à les convaincre, à mon tour, que c’est possible de vivre bien.

Parce qu’on ne naît pas anxieux, en colère, violent ou en détestant la Saint-Valentin. La vie nous transforme à son gré et selon un paquet de facteurs différents. Bien sûr, j’enlève de l’équation les évènements extérieurs comme les tragédies climatiques, la maladie et tout ce qu’on ne peut réellement contrôler.

Il y a les épreuves que la vie nous envoie et celles que l’on se crée. Ce sont de ces dernières dont je parle. J’accepte aujourd’hui de ne pas avoir le contrôle sur beaucoup d’épreuves que la vie m’envoie, mais j’assume surtout avoir le pouvoir de contrôler et de diminuer celles que je me crée moi-même.

C’est à grands coups d’amour (merci Gerry Boulet), d’humilité, de patience, de courage et de travail que j’y arrive, mais tout ça ne serait rien sans l’amour propre. Heureusement, ça se cultive.

Qu’on s’entende, je ne dis pas que, si on s’aime, dans deux jours, les itinérants auront un toit, un emploi stable et que les gens vont se mettre à « pitcher » des rayons roses par le ventre comme les Calinours pour enrayer la misère.

Il faut juste faire un premier pas. Pour ma part, j’ai changé mon alimentation, j’ai perdu du poids, j’essaie d’être à l’écoute des autres, je me fâche moins et l’angoisse et l’anxiété ont quasiment disparu. Mais je me fâche encore et il m’arrive de moins bien manger, de perdre patience et de trop vouloir être parfait.

Mais ce qui me sauve, c’est l’amour. Chaque fois. Je me pardonne (difficilement), je remonte dans mes souliers et je recommence. J’essaie vraiment fort d’avoir la même patience pour les autres, aussi.

Je vous souhaite autant de bonheur que je m’en souhaite. J’aimerais ça qu’on soit une géante gang à s’adresser à la réalité, plutôt qu’à faire semblant que ça n’existe pas, à travers des concours d’égos et de relations futiles. En plus, quand on est une grosse gang, ça coûte moins cher louer le Laser Quest.

L’histoire ne s’arrête pas ici pour moi. La vie continue et c’est avec toute l’humilité du monde que j’espère avoir fait du bien à quelqu’un. C’est ma petite histoire à moi, elle vaut ce qu’elle vaut.

J’ai confiance qu’elle finisse bien, parce que j’ai choisi l’amour.

(OH SHIT! LA FIN C’EST COMME LE DÉBUT, C’EST TELLEMENT CONCEPT!)